Les sports entrent en guerre
Publié le 29 juillet 2024
Lors de la mobilisation, les sportifs français, pour la plupart jeunes et soumis aux obligations militaires, sont dispersés dans leurs unités d’affectation. Il existe peu de possibilités d’obtenir des postes de complaisance. Il en va différemment en Grande-Bretagne, dont l’armée, au début du conflit, est seulement composée de soldats professionnels et de volontaires : si nombre de sportifs amateurs s’enrôlent, les professionnels continuent de jouer dans leurs clubs respectifs. En Angleterre, les pressions exercées par le gouvernement sur la Football Association la poussent à suspendre en juillet 1915 toutes les compétitions qu’elle organise. Il en est de même en Irlande, alors que le championnat écossais se jouera durant tout le conflit. En décembre 1915, le premier Footballers Battalion, exclusivement composé de joueurs et de supporteurs, voit le jour.
Au cours des premières semaines du conflit, la guerre de mouvement ne laisse que peu de temps aux soldats français pour se reposer et a fortiori pour jouer au football ou au rugby. Cependant, quelques soldats ou sous-officiers, qui étaient avant-guerre des sportsmen, organisent de manière spontanée des matchs avec leurs camarades, sous l’œil dubitatif de la plupart des officiers, qui considèrent ces jeux comme des moments de distraction trop joyeux et contraires à l’effort de guerre. À l’inverse, tous les bataillons britanniques possèdent leur équipe de football. Quand ils débarquent en France, les matchs se multiplient dans les villes portuaires comme au Havre et à Boulogne-sur-Mer.
La presse sportive se mobilise elle aussi dès les premiers jours, d’abord dans son discours avec la métaphore du « Grand Match ». La guerre n’est qu’un prolongement du sport où la feinte, le dribble et la force doivent mener les Français à la victoire. Au-delà de ce discours guerrier, les journaux défendent la pratique sportive des soldats afin de leur apporter du réconfort, mais aussi parce que « l’effort athlétique […] est infiniment plus proche de l’effort héroïque déployé, sur un champ de bataille, par nos soldats que de l’effort de roublardise, déployé autour du tapis vert, par des amateurs de manille » (Sporting, 29 octobre 1914). Afin de répondre aux demandes pressantes des soldats, le journal L’Auto met en place dès le mois de novembre 1914 une œuvre caritative dénommée « Les ballons du soldat », qui a pour objet l’envoi de ballons, essentiellement de football, au front. Ce soutien matériel permet aux Poilus footballeurs d’organiser les premiers matchs avant la fin de l’année 1914.